Agus

Souvenirs d'une enfance Balinaise

 

Il y a 25, 30 ans Bali n'était pas autant développé qu'actuellement. Les habitants des villages comme le mien étaient pauvres nous n'avions pas tous les emplois créés par le tourisme comme aujourd'hui. Pour se nourrir c'était donc surtout de la débrouillardise comme vous allez le constater dans la suite de cet article où je vous raconte quelques souvenirs de mon enfance …

A Bali nous vivons en communauté: de la famille proche à la famille éloignée ça en fait donc du monde et surtout des cousin(e)s ! Petit après l'école comme nous n'avions pas grand chose à faire puisque pas de jouets ni télé les mamans envoyaient les enfants chercher une source de la nourriture le plus souvent dans les rizières, en même temps pour nous cela était source d'amusement.

 

Quand le riz était haut nous allions avec mes cousins dans les rizières chasser les libellules qu'on appelle « capung ». Avant de se rendre dans les rizières pour les chasser nous préparions notre matériel pour les attraper : une colle faite avec  la suc du frangipanier avec un mélange d'huile de coco. (Cela prenait une journée pour la réaliser). Puis nous allions prendre des nervures de feuilles de coco et au bout de ces nervures nous mettions cette colle spéciale et hop on attrapait ainsi les libellules. Une fois un cousin plus futé que nous autres attrapa une petite libellule à laquelle il attacha un fil à sa queue afin qu'elle ne s'échappe pas. En la tenant par ce fil il la laissa voler, cette petite libellule attira de plus grosses libellules que nous autres avons attrapé facilement avec nos sticks.

A Bali d'autres enfants ont une une méthode différente, ils utilisent comme colle le suc de fruit du jaquier mélangé avec de l'huile de coco. La libellule alors attirée par ce jus se pose sur le bâton et se retrouve collée, et voila le tour est joué. Une fois les libellules mortes les ailes leur sont enlevées, la tête également ainsi que la peau. La viande est alors mélangée avec des épices,échalotes et un peu de coco gratinée puis cette viande est enveloppée dans des feuilles de bananes et enfin cuite de façon traditionnelle. Un délice pour nous Balinais mais maintenant vous ne verrez pratiquement plus d'enfants courir après des libellules.

 

Sachez que les libellules sont consommées dans l’ensemble de l’île mais les noms, les méthodes de capture et les croyances peuvent différer d’une région à l’autre. Il est dit qu’un Balinais doit avoir mangé au moins une fois dans sa vie une libellule !

 

Quand le riz est coupé c'était alors la saison pour moi et mes cousins de chercher des criquets que nous faisions sortir des trous où ils se cachaient en mettant de l'eau sur les trous. Une fois que les rizières étaient gorgées d'eau venait alors la saison des escargots que nous cherchions dans les rizières boueuses, bon bien sur parfois comme vous pouvez le supposer cela se terminait en bagarre de boue. Et il y a aussi les anguilles que nous allions chercher la nuit avec des torches, il ne fallait pas être peureux car il faisait vraiment nuit noire dans les rizières, il n'y avait pas autant d'habitations qu'actuellement. De nuit il était plus facile de  surprendre les anguilles qui étaient à la surface. 

 

Il y avait aussi la pêche mais dans les rivières, à l'époque celles-ci étaient propres il y avait donc beaucoup de poissons. Lorsqu'on allait pêcher on était toujours sur de repartir avec quelque chose, si pas de poissons c'était crabe ou crevettes. Les sorties à la rivière étaient aussi l'occasion pour nous de s'amuser en se baignant.

Une fois je me souviens nous sommes allés à la rivière et il n'y avait plus d'eau à cause d'un barrage fait plus haut (pour je ne sais plus quelle raison et tout le monde a averti famille et voisins de vite venir à la rivière récupérer crevettes et poissons dans les marres. Nous étions tous contents de pouvoir en ramener beaucoup à la maison première fois qu’on en avait autant d’un coup !

Tous ces animaux que nous rapportions à nos familles étaient suffisants pour nos repas composés essentiellement de riz et de légumes car les Balinais consomment peu de viande durant leurs repas. Certes le babi guling est un plat Balinais mais nous n'en mangeons que lors de célébrations importantes et non quotidiennement même si maintenant il y a des warungs de babi guling.

 

PHOTOS DE MON ENFANCE

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Au milieu moi, assis sur mes genoux un cousin et à droite de la photo : mon frère Indra

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Encore moi

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Assis sur les genoux de mon grand-père et à droite de la photo : mon papa

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Cour devant l'entrée principale des maisons de toute la famille

D'AUTRES SOUVENIRS EN VRAC

 

Dans mon Bali d’il y a une trentaine d’années les routes des villages n’étaient pas encore goudronnées, les voitures très rares appartenaient aux riches, les motos à ceux qui en avaient les moyens. Pour se rendre à l’école c’était le plus souvent à pieds, à vélo ou encore en bémo qui lui était un des moyens de locomotions les plus utilisés par la population. D’ailleurs mon père était chauffeur de bemo, c’est ainsi qu’il a rencontré ma mère. Parfois pour accéder à un autre village il fallait faire un grand détour car il n’y avait pas de petites routes pour lier certains villages entre eux.

Lorsque nous faisions le trajet aller retour pour aller à l’école nous enlevions nos chaussures afin de ne pas les user. Cette pratique existe toujours ne soyez donc pas surpris en voyant certains écoliers avec leurs chaussures à la main.

Les combats de coqs étaient encore grandement présents à Bali et nombreux sont ceux qui se sont endettés ou ont tout perdu à cause de leur addiction aux paris liés à ces combats.

La télé n’existait pas nous écoutions donc la radio, je me souviens que presque tous les matins tout le monde était scotché à son poste pour écouter une histoire traditionnelle contée en épisode. La première personne à avoir eu une télévision dans ma très grande famille fut le prêtre, une télé en noir et blanc qui ne comptait que 2-3 chaines.

Nous n’avions pas de coin pour se laver à la maison ni de toilettes nous nous rendions donc à la rivière pour tout cela pas d’autre choix. Et pendant qu’on se lavait à la rivière ma mère en profitait pour lessiver. Ah oui et le sol de notre maison n’était pas fait de ciment mais de terre. Ma maman se rendait au temple à pieds, son panier d’offrandes sur la tête, mon petit frère qu’elle tenait dans ses bras et moi qui marchait à ses cotés en lui tenant la main.

 

On n’avait pas grand-chose à cette époque c’est vrai mais cela ne nous a pas empêché d’être heureux, nous nous contentions de ce que nous avions.

 

 

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